Julie et Maurine fondatrice de MyList.ae
Difficile d’imaginer une histoire plus simple. Julie et Maurine se sont connues dans les cours de préparation à l’accouchement l’an dernier à Dubai où elles avaient suivi leurs maris. La première est avocate, l’autre est experte en marketing et gestion de projets. Elles ont commencé par parler de l’impossibilité d’ouvrir une liste de naissance pour recevoir les cadeaux de leurs familles respectives.
Elles ont sympathisé et parlé du peu d’attrait que représentait pour elles la vie de femme d’expat (l’univers se rétrécit, à commencer par le regard des autres qui commencent toujours par vous demander « que fait votre mari?) ou le retour aux horaires fixes de bureau qui ne laissent pas de temps pour s’occuper des enfants, partager leurs meilleurs moments.
Ensemble elles ont décidé de se lancer à l’assaut d’un des marchés les plus prometteurs: le commerce online dans les Émirats. Leur cheval de Troie? MyList.ae, le premier site régional de listes de cadeaux (mariages, anniversaires et autres) fonctionnant avec plusieurs magasins locaux. Il est fonctionnel depuis quelques semaines à peine.
C’est Julie qui a eu l’idée mais Maurine, dès qu’elle la connue, s’est déclarée partante.
« C’est simple, » m’expliquent-elles, « plus de 80% de la population de Dubai vient de l’étranger or envoyer des cadeaux coûte très cher, le poids de ce que l’on peut apporter dans les valises est limité et recevoir un virement c’est pas très convivial. Le pire c’est qu’on trouve tout ici. Et pourtant, le commerce online est encore très limité. Le marché local est hyper dynamique mais pas sur le net ».
J’ai pris sérieusement mes notes, mais elles parlent toujours ensemble et quand l’une commence une phrase un peu longue, il est courant que l’autre la termine. Alors, impossible de garantir laquelle a dit quoi. Le fait est qu’elles sont nées à 11 jours l’une de l’autre (il y a 31 ans), que leurs maris – qui ne se connaissaient pas – proviennent tous les deux de la même ville du nord. Elles ont, chacune, deux garçons du même âge (les petits derniers devaient même naître le même jour: le 17 décembre). Seule différence: l’une est blonde (Maurine) et l’autre brune.
Pour créer leur site dans ce pays où tout le monde est sous l’égide de quelqu’un elles ont du obtenir – comme pour leur permis de conduire – un document signé par leur époux disant qu’il ne faisait pas objection à leur entreprise. Elles ont du éplucher des contrats longs comme le bras et déposer des sommes respectables d’argent en banque comme garantie.
« Nous avons voulu commencer avec peu de risques: ni stock ni loyer et le dépôt représente un capital relativement raisonnable. Nous amenons les clients dans leurs magasins et les commerçants aiment ça. Et ils ne payent que si une vente a été effectuée. Ils aiment ça aussi. » Sourires.
La personne qui fait le cadeau dépose l’argent en Euro ou en dollars et paye les frais de change. Les bénéficiaires du cadeau se voient remettre un bon d’achat en dirhams avec un hologramme infalsifiable qu’ils présentent au magasin partenaire « qui nous le transmet contre un virement bancaire moins notre commission, » disent elles. « Notre service est gratuit pour les utilisateurs. Nous ne dévalorisons pas les marques. Si nos clients retournent dans un magasin ils paieront le même prix et n’aurons pas l’impression de se faire avoir la deuxième fois. A la différence de Groupon nous offrons du rêve, pas du discount  » Re-sourires.
Elles ont la pêche et plein d’espoir: elles apportent une solution commode au problème d’une grande partie de la population locale. Familiers avec le concept, les Européens devraient être faciles à convaincre. Et leur offre pourrait faire boule de neige, grâce à Facebook où elles ont leur page, à Twitter et au traditionnel bouche à oreille des communautés d’expats.
Leur site est en anglais et en arabe avant d’être en français car elles ont bien l’intention de s’attaquer à d’autres univers culturels qu’elles essayent de comprendre. Les mariages locaux réunissent facilement mille personnes. Pourquoi ne pas leur proposer les cadeaux collectifs? Nombreux à Dubai, les Libanais retournent se marier chez eux mais ne parviennent jamais à rapporter tout ce qu’on leur offre. « Que faire du divant qu’ils ont reçu? » s’amuse Julie-Maurine. « Nous leur permettons de résoudre le problème. »
Il y a plus prometteur encore. Le Diwali, par exemple, une des fêtes indiennes les plus importantes est l’occasion de cadeaux. Elles vont proposer leur plateforme aux immigrés à Dubai et une fois qu’ils y auront pris goût – elles en sont certaines – pourquoi ne pas s’en prendre à leur pays d’origine « un marché hallucinant » disent elles. Elles doivent bien savoir que l’Inde c’est une autre paire de manches, mais elles savourent encore avec délices les premiers pas de leur bébé commun… qui promet.

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...