mapoftheinternet-anthony_j_ina.1243148470.jpg Les Américains tendent à penser que « l’internet est cassé » comme je l’ai montré dans mon dernier billet . Sans ignorer les problèmes de sécurité posés par l’architecture originelle, les Européens mettent d’abord l’accent sur les activités qui n’avaient pas été envisagées au départ.

Lors d’une conférence réunie par la Commission européenne à Prague le 11 mai (où j’avais été invité à modérer deux « panels », deux discussions) les participants mirent en avant : les « rich media » (vidéo et bientôt 3D), le contenu généré par les usagers (web 2.0), les réseaux sociaux et surtout le web mobile dont l’importance grandit avec la multiplication des smart phones.

En bref : l’internet est victime de son propre succès et il faut lui donner les moyens d’y faire face.

Mais… « les changements requis sont de type évolutionnaire. Il n’y a pas besoin de révolution » m’a expliqué João da Silva directeur à la Direction générale pour la société de l’information et les médias de la Commission Européenne, organisatrice de la réunion. Le système doit être amélioré mais c’est faisable de façon progressive. Et les Européens entendent participer avec leurs propres pinceaux et palettes aux retouches nécessaires.

L’Europe a d’ailleurs ses propres programmes de recherche sur le futur de l’internet parmi lesquels l’initiative FIRE est la plus connue.

Les différences entre les deux rives de l’Atlantique peuvent être très concrètes. Bernard Benhamou , Délégué aux usages de l’internet au ministère français de la recherche m’a expliqué que « Plutôt que de vouloir « détruire » l’Internet pour créer un réseau de haute sécurité, on pourrait imaginer pour développer de nouveaux réseaux une approche dite d’‘Overlay’ (c’est un peu ce que nous vivons avec des réseaux parfois hétérogènes qui tous se connectent à l’Internet)”.

Il insiste sur le fait que l’autorité en matière de DNS (le Domain Names System qui gère les noms de domaine) se trouve sur la responsabilité de VeriSign, une entreprise américaine et que cela “pose donc à l’ensemble des États Européens des problèmes évidents de souveraineté”.

Directeur scientifique pour l’internet de l’entreprise espagnole Telefónica, Pablo Rodríguez s’est rangé dans le même camp… de façon plus enjouée quand il m’a expliqué, lors d’une conversation qui s’est tenue à Palo Alto (une semaine après la conférence de Prague à laquelle il participait) : « Personne ne peut dire que l’internet est cassé puisqu’il fonctionne merveilleusement tous les jours. Mais nous pourrions l’améliorer ». Ce que je me suis permis d’interpréter comme « nous devrions… ».

Il voit dans tout cela un excellent « exercice intellectuel » avant de conclure avec une formule qui me semble bien résumer la pensée européenne en la matière : « Il n’y a rien que nous ne puissions faire au niveau des couches supérieures » (l’overlay dont parle Benhamou et beaucoup d’autres).

PS – Ce billet et le précédent constituaient un article publié dans le supplément techno d’El País le 21 mai.

[Photo FLickr de anthony_j_ina ]

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...