Et si les médias se trompaient de stratégie online? Tout leur effort semble orienté à faire de leur site web une destination, comme ils avaient conçu leur journal, leur magazine, leur chaîne ou leur station.

Ils feraient bien mieux de concevoir leur offre comme une plateforme fonctionnant en réseau.

Telle est l’essentiel de l’argumentation avancée par Rich Gordon, professeur à la Northwestern University dans un billet tout récent .

L’objectif est, selon lui, de « connecter contenu et conversations », ce que produisent les journalistes et ce dont parlent les gens.

Pour cela il faut transformer le site en « hub » ou moyeu, en ce qui, dans la théorie des réseaux est un nœud d’où partent et où aboutissent un très grand nombre de liens.

Un tel site « attirerait les usages de beaucoup de sites, retiendrait certains d’entre eux pour un temps en leur offrant des liens contextuels, les dirigerait vers du matériel de valeur situé ailleurs et capitaliserait les conversations qui ont lieu sur le web qu’il s’agisse des blogs, des forums ou des commentaires mis en ligne par les usagers ».

La piste a été défrichée par les meilleurs blogueurs qui ne font pas autre chose, note Gordon. Elle s’appuie, en outre, sur la théorie des réseaux qui nous montre l’importance des « virtuoses » (les membres qui, selon Malcolm Gladwell, détiennent beaucoup de savoir et d’influence) et des « connecteurs (ceux qui ont des relations avec beaucoup d’autres personnes). Les médias, selon Gordon doivent s’appliquer à exercer les deux fonctions.

Pour cela il donne quelques conseils simples:

  • Multiplier les liens vers l’extérieur, en particulier vers les blogs, et vers ses propres archives (qu’il conseille d’ouvrir pour en faire des éléments de référence accessibles à tous);
  • Encourager les conversations autour de son propre contenu;
  • Distribuer généreusement, sous de multiples formes;
  • Construire ses propres réseaux sociaux dans de nouvelles relations avec les usagers;
  • Multiplier les raccourcis permettant d’accéder à son site depuis n’importe où sur le web.

Gordon ajoute deux dimensions qui me semblent essentielles:

  • Une stratégie réticulaire permet de connecter les deux mondes (virtuel et physique) et de tirer le plus grand parti des infos locales pour lesquelles les médias traditionnels sont imbattables.
  • Une stratégie réticulaire est cohérente avec certaines études sur les expériences les plus fortes en ligne, celles qui « permettent d’établir des connexions avec d’autres », « valent la peine d’être gardées et partagées », « me font découvrir d’autres médias ».

Rien de très nouveau mais ces réponses simples ne sont pas suffisamment mises en œuvre et gagneraient sans doute à être intégrées dans une vision stratégique claire.

Elles ont en outre l’avantage de nous inviter à remettre en question notre conception de la valeur (et peut-être même de la nature) des informations que nous publions et/ou que nous lisons. C’est sans doute là que se situe le véritable nœud du problème.

Qu’en dites-vous?

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...