anh-tuan.1171695533.JPG Par Anh-Tuan GAI*

La vision la plus répandue du web 3.0 est un web sémantique permettant d’obtenir des réponses cohérentes à des questions complexes. Cependant, il me semble que cette amélioration technique ne changerait pas fondamentalement la nature du web. Je crois que le web 3.0 garantira liberté, performance et sécurité aux internautes quand ils prendront le contrôle de l’hébergement de leurs vies numériques.

Voici donc une autre vision:

Web 1.0: Les contenus sont produits et hébergés par des entreprises.

Web 2.0: Les contenus sont produits par les internautes et hébergés par des entreprises.

Web 3.0: Les contenus sont produits et hébergés par les internautes.(Cela signifie ne plus héberger son mail sur Gmail, ses photos sur Flickr, etc… Les données sont reçues, stockées et accessibles sur une machine administrée par et physiquement chez l’internaute.)

En quoi cette nuance technique sur l’hébergement rend-elle ce web 3.0 totalement différent du web 2.0 d’aujourd’hui?

1) Sécurité du web: Aujourd’hui, les internautes hébergent leurs données (mail, site web, photos, etc…) sur des serveurs administrés par des compagnies profitables. En hébergeant eux mêmes leurs données, les internautes peuvent héberger des données plus sensibles/privées. Ce web 3.0 donnerait donc accès à un nouveau type de données et permettrait une réelle ubiquité pour toutes les données.

2) Les limites du web: Aujourd’hui, les hébergeurs proposent des services limités en qualité (ex: 5Mo par photo) et en quantité (ex: 3Go pour le webmail). En hébergeant leurs données chez eux les internautes n’auront plus de limites quantitatives et qualitatives. Ce web 3.0 donnerait donc accès à une quantité et une qualité de données illimitées.

3) Liberté et créativité sur le web: Aujourd’hui, changer d’hébergeur est contraignant. Il faut prévenir ses contacts du changement, récupérer ses photos avant de les mettre chez un autre hébergeur, etc… Ceci favorise l’immobilisme et rend plus difficile l’émergence de nouvelles solutions. Pour changer de solution dans ce web 3.0, il suffirait d’installer un nouveau logiciel permettant d’héberger des données et les services associés (client mail, gestion d’albums photos, etc…). Ce web 3.0, comme les logiciels libres, favoriserait donc la créativité des développeurs et permettrait aux utilisateurs de toujours avoir accès aux meilleures solutions.

4) Économie du web: Pour héberger des données dans ce web 3.0, les internautes utilisent les ressources de leur machine (mémoire, calcul et réseau). En utilisant la technologie peer-to-peer qui permet de mutualiser les ressources de millions de machines, ce web 3.0 pourrait proposer gratuitement des services aujourd’hui coûteux (ex: sauvegarde en ligne) ou sans intérêt commercial.

Que pensez-vous de cette vision « réseau libre » du web 3.0 ? Pensez vous que la mutualisation des ressources basée sur le volontariat se généralisera au point de rendre les grandes communautés d’internautes plus puissantes (en terme de ressources) que les géants de l’Internet d’aujourd’hui ? Enfin, pensez vous que cette approche puisse être transposée en un modèle économique et social ?

* Au début de l’année je vous avais invités à faire vos prévisions pour 2007 en promettant aux meilleurs de les inviter à CaféTransnets. Anh-Tuan Gai s’était détaché du lot (voir ce billet ) voici donc sa contribution. Elle porte, c’est logique, sur l’avenir du web, une des directions qu’il pourrait prendre. Docteur en informatique (thèse effectuée sur les réseaux peer-to-peer) Anh-Tuan est actuellement post-doctorant à l’INRIA. Il est aussi l’un des fondateurs du logiciel libre Peerple (accès à distance, partage sécurisé et sauvegarde en peer-to-peer, bientôt accessible en français). Anh-Tuan précise, quand on lui demande de se présenter qu’il « ne possède pas de blog mais aime bien « spamer » ceux des autresJ« . En l’occurrence je crois que nous pouvons l’en remercier.

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...