La longue traîne (The Long Tail) c’est donc la possibilité qu’offre l’internet de sortir de la production et de la consommation de masse pour servir les marchés de niches et y gagner de l’argent.

La première vertu que j’y trouve c’est que ça encourage la diversité (voir ce billet). Mais Chris Anderson, l’auteur de l’excellent livre et blog sur le sujet, attache beaucoup plus d’importance au fait que ça marque, selon lui, l’entrée dans une économie d’abondance (voir ce billet). Les deux ne sont pas incompatibles, mais il n’est pas neutre de savoir sur quoi on met l’accent.

L’abondance en question est, bien entendue, toute relative. Il y a sans doute beaucoup de produits sur le marché et beaucoup de gens qui peuvent avoir connaissance de l’existence de ces produits. La majorité des humains vit encore dans un univers de pénurie. Ce qui change pour beaucoup c’est l’abondance dans les choix. Et point n’est besoin d’être riche pour y être exposé.

Des études antérieures avaient montré que la multiplicité des possibilités peut être source d’angoisse. C’est le « paradoxe du choix » (vous pouvez voir cette vidéo, lire cette entrevue ou ces extraits du livre de Barry Schwartz intitulé « The Paradox of Choice, why more is less »). Anderson (dont le livre a pour sous-titre: « Why the Future of Business is selling less of more ») reprend le problème en montrant que, même si la décision est difficile à prendre, le processus du choix, peut être gratifiant par ce qu’il nous permet de nous affirmer.

Et puis l’internet peut rendre la tâche moins difficile grâce à l’efficacité des moteurs de recherche, des différents systèmes de recommandations, ou de conseils mis en ligne par les utilisateurs eux-mêmes.

Ces mécanismes sont d’autant plus efficaces qu’ils surviennent a posteriori, une fois que ces personnes connaissent le produit et l’ont essayé. « La différence entre le ‘pré-filtrage’ et le ‘post-filtrage’ est celle qui existe entre prédire et mesurer. Cette dernière est inéluctablement plus précise » explique Anderson.

Donc, les niches sont rentables. Nous pouvons y trouver ce qui nous convient malgré l’abondance des choix. La diversité fait bon ménage avec l’abondance. Mais… ne courrons nous pas le risque d’une fragmentation sociale excessive voir dangereuse? Anderson n’a pas peur, d’abord parce que « Le nouveau marché des niches ne remplace pas le marché traditionnel des ‘hits’ (ou succès, comme dans ‘hit-parade’) il se contente de partager la scène avec lui pour la première fois. »

Il est convaincu que « la culture de masse peut s’estomper, pas la culture commune. Nous partagerons notre culture avec d’autres, mais pas avec tout le monde. » C’est sans doute encore plus vrai maintenant et dans de multiples contextes mais, qui a jamais partagé sa culture « avec tout le monde »? La nouveauté n’est-elle pas que les diversités peuvent s’épanouir, même au niveau global et surtout qu’on assiste à l’émergence et à la multiplication de diversités communicantes?

Voilà un nouveau monde…

Qu’en dites-vous?

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...