Pour discuter des questions qui nous préoccupent nous avons formé avec quelques amis de Berkeley un groupe de lecture. Ils viennent de partir et j’ai envie de partager avec vous le sujet du jour: un livre intitulé « The Wisdom of Crowds », la sagesse des foules, écrit par James Surowiecki, chroniqueur financier du New Yorker (informations sur le livre, extraits, interview > là).

Publié après Smart Mobs de Howard Rheingold et The Tipping Point de Malcolm Gladwell, ce bouquin alimente le courant des très nombreuses personnes qui dans le monde des affaires aussi bien que dans la société civile s’interrogent sur les formes d’organisation et le rôle des TIC dans le monde qui change.

Les groupes sont plus intelligents

L’argument de base de Surowiecki est que si les bonnes conditions sont réunies « les groupes sont plus intelligents que la personne la plus intelligente en leur sein ». Il en veut pour preuve le fait que si l’on demande à un groupe d’évaluer à l’œil le poids d’une vache l’ensemble des « coups d’œil » fournira une réponse plus juste que l’immense majorité des individus pris séparément. La liste des exemples allant dans ce sens est impressionnante.

Cela se traduit par le fait que les marchés électroniques peuvent prévoir le résultat d’une élection présidentielle avec une imbattable précision (pour voir un des exemples les plus connus, cliquez ici). Une société demandant à plusieurs dizaines de personnes quel est le produit ayant le plus de chance de s’imposer sur le marché réussira mieux que si elle se base sur le verdict des experts.

Conditions de succès

Les conditions en question sont au nombre de quatre: la composition de la foule doit faire place à la diversité; sont fonctionnement doit être décentralisé; chacun doit être indépendant des autres; il faut enfin un mécanisme satisfaisant pour réunir toutes les opinions.

Le paradoxe c’est que la meilleure décision de l’ensemble dépend de l’indépendance des parties. Le plus difficile à comprendre peut-être c’est que cette « sagesse » n’a rien à voir avec le consensus. Elle repose plutôt sur « le désaccord et même le conflit ». Elle ne provient pas du compromis.

Remise en question des hiérarchies traditionnelles

De mon point de vue, une des faiblesses du livre est que si le mécanisme semble efficace pour réunir les informations nécessaires à la prise des décisions il n’en dit pas assez sur l’importance et les modalités de leur mise en œuvre.

L’intérêt du livre, dont on discute beaucoup dans le coin, est qu’il apporte des arguments à la remise en question des experts et des hiérarchies traditionnelles.

La discussion passionne aussi bien les milieux d’affaires désireux d’innover que les activistes de la société civile en lutte contre les pouvoirs et les informaticiens inventeurs des outils qui changent la donne.

Je me demande si ce genre de débat existe en France (dans quels milieux?) et si vous le trouvez pertinent.

Est-ce que vous y croyez, vous, à la sagesse des foules?

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...